Tuesday, November 26, 2013

Fukushima: état d'exception permanent





26 cas de cancers de la thyroïde opérés sur Fukushima et 32 autres sur le point de l'être, il y a augmentation des cas de cancers. Le gouvernement japonais refuse le lien possible entre l'accident de Fukushima et la poussée du nombre de ces cancers. Une question de date, de savoir quand et comment les tests de dépistages de ces cancers ont démarré au Japon. Des imprécisions apparaissent sur les dates et les mesures des radiations. Dans un pays aussi organisé et scrupuleux que le Japon, cela semble invraisemblable. Pourtant les scientifiques ne sont pas aussi optimistes que les organisations gouvernementales sur l'impact de l'accident de Fukushima Daiichi. Un discours alarmiste face au discours de bon sens? 

Je me souviens d'avoir abordé la question de l'information scientifique lors d'une conférence et un débat organisé à Kyoto le 1er Octobre 2011 par la délégation européenne au Japon, en marge du "Science Technology and Society Forum". 

Pourquoi disais-je alors y-a-t-il aussi peu de convergences entre les scientifiques sur l'explication de la catastrophe mais ensuite sur les conséquences humaines, psychologiques, économiques? Quelles réponses technologiques offrons-nous pour opposer le drame suscité par Fukushima Daiichi? Que dire du démantèlement et de la décontamination actuelle sur le réacteur 4 de Daiichi? J'ai reçu cette intéressante communication d'un scientifique français qui travaille sur Tchernobyl et Fukushima : 

“… L’industrie atomique est coutumière de l'usage de bras et robots télémanipulés pour saisir et déplacer des objets irradiants. Quant aux manifestations de goût pour la catastrophe annoncée, c'est le syndrome de la tour infernale, sans happy end de préférence. On se joue un scénario apocalyptique sans tenir compte du contre et en imaginant un pour où tout convergerait, la fragilité du système, l'incompétence mille fois affirmée de l'opérateur (sans autre confirmation que des fuites, inévitables quand on pense aux circonstances), des faits de Dieu (du Diable en l'occurrence) et un danger surévalué à son maximum maximorum, la sublimation intégrale du stock des pastilles radioactives de céramique frittée contenues dans les assemblages de combustible usé. La perspective de l'Archipel nippon rendu inhabitable pour l'éternité et d'un Océan mondial à l'état de soupe radioactive complète le tableau. Que cela n'advienne pas sera mis sur le compte de la chance, une chance presqu'imméritée. Avec des si, dit le dicton, on mettrait Paris en bouteille.

L'ignorance qui se croît sachante conduit à colporter ces divagations urbi et orbi via les “réseaux sociaux” et le web. Pour faire du chiffre certains journaux poussent à la roue. Et si vous faites valoir des doutes, alors vous êtes, soit un salaud pro-nucléaire, soit un cynique payé par le lobby, soit complètement inconscient. Les conséquences de tout ce vacarme : les dégâts à bas bruit engendrés par les faibles doses passeront plus facilement inaperçus ; le sort des évacués logés dans des alignements de conteneurs ou entassés dans des gymnases paraît presqu'enviable en regard à ce à quoi aurait échappé toute la population du pays. Le négationnisme scientifique de la CIPR et de l'UNSCEAR n'aura aucun mal à s'imposer. Les immenses problèmes posés par les réacteurs fondus seront perçus en proportion du volume qu'ils occupent rapporté à de celui de l'immensité qui “aurait pu” devenir déchet radioactif mortel…” Fin de citation.
   

Que va-t-il en advenir? 

Pas nécessairement et uniquement l’arrivée des maladies dues à l'exposition au rayonnement, mais "quid" des maladies psychologiques, la peur, l'incertitude, l’impact démocratique, le risque du mensonge, du secret et de la censure imposées par les autorités ?

Un journaliste vérifie par lui-même, ce que nous avons constaté le 7 novembre 2013 sur Fukushima Daiichi, ce que j'ai vu lors de 3 reportage en 2013 sur le site de la centrale nucléaire dévastée, c'est une amélioration incontestable par rapport aux mois qui ont suivi mars 2011 et une baisse depuis mars 2013 de la radioactivité. Mais je souhaite aussi en apprendre davantage sur ce tabou qui a entouré la mise en place du nucléaire civil au Japon, et sur l'absence de suivi technologique et de mise à jour avec apport de nouveaux réacteurs, de nouvelles technologies, de meilleure coopération internationale. Une revue scientifique russe expliquait, je cite: "One of the causes of the Fukushima accident was that having a 1960s design the operator did nothing to improve the design safety bases. They tabooed any changes."

Un tabou? Mais se doter de source énergétique n'est pas un tabou, et défendre les raisons qui consistent à protéger les populations, est-ce si difficile pour un gouvernement d'un pays démocratique? Quand cela explose cela le devient. Encore trop peu de progrès ont été notés pour les personnes déplacées par l'accident de Fukushima. Si peu de compensation pour ces victimes mal traitées. L'Etat japonais qui aujourd'hui contrôle Tepco a néanmoins décidé d'entreprendre un projet de gestion de la catastrophe en continu. Encore peu de détails, les financements sont astronomiques. D'ores et déjà, on sait que la communication est méthodiquement revue, confiée aux agences spécialisées, et que les ressources scientifiques sont offertes, partagées, étudiées, pour innover, pour gérer la crise, mais pas certain que les choix technologiques japonais seront garants de totale sécurité et la crise durera 30, 40 ans... et dans l'intervalle les affaires et l'industrie devront tourner comme si de rien n'était. Mais que faire d'autres? Fermer le Japon? Un de mes collègues journaliste français, commentateur bien connu, avait déclaré avec justesse sur les antennes que la configuration de Honshu interdit aux japonais de fuir leur étroit bord de mer où sont concentrées les activités économiques. 


Réalisme versus alarmisme écologique?

L'irréalité dans laquelle se réfugient propagandistes et alarmistes est naturellement source de consternation et d'effarement. Pourtant un véritable drame humain se joue pour 150.000 à 200.000 "réfugiés nucléaires" rejetés par le reste de la population japonaise. Ce sont des japonais isolés, refermés sur leur destin qu'ils ne contrôlent plus. A prévoir aussi des années très difficiles pour les populations agricoles, les pêcheurs, les enfants, que les paroles rassurantes du gouvernement japonais ne touchent pas et plus jamais. Un impact économique et une région qui vit sous le rayonnement et la menace d'un nouvel accident. Un déficit de confiance, un état de catastrophe permanent "si" quelque chose se produit et qui risque le jour venu de pénaliser sévèrement la crédibilité de l'administration dont le chef de file Shinzo Abe servira de fusible facile à éjecter. 

Pour l'heure il est si urgent d'apprendre et de tirer les enseignements, pour tous, de cet accident dont on connait ici au Japon l'origine, avec la forte probabilité d'un risque récurrent majeur du à des catastrophes naturelles et à de multiples dangers pour la santé publique.




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